La révolte des taxis ces derniers jours a mis en lumière deux points de crispation d’une certaine France qui refuse de regarder le progrès. Le premier, un Etat incapable d’incarner le changement, englué dans une politique politicienne hors sol ; le second, des systèmes économiques d’un autre âge avec le maintien de rentes et de monopoles qui bloquent la croissance et l’innovation.
Le secteur de l’optique français a longtemps vécu (et s’est enrichi) par et grâce aux mutuelles, opportunistes acteurs qui ont utilisé les lunettes comme un produit d’appel. Au nom d’un meilleur accès aux soins (sic !), le gouvernement socialiste a brisé cette rente avec des nouvelles règles du jeu qui déstabilisent le secteur. Pas pour longtemps, les distributeurs et les industriels vont s’organiser pour préserver leurs marges avec des lunettes à 150 €, le prix imposé par l’Etat. Un Etat qui déplace le problème et ouvre la voie à une nouvelle rente…
Ce n’est pas une économie réglementée qui permet l’épanouissement de l’innovation, l’entrée de nouveaux entrants sveltes et inventifs qui répondent aux aspirations de clients, de consommateurs en recherche d’alternatives face à des rentiers obèses. Les opticiens sont devenus les pantins d’un système à bout de souffle, ils s’accrochent à leurs prébendes, mais elles se réduisent comme peau de chagrin ; demain, un Uber de l’optique viendra créer un appel d’air et bousculer une distribution poussive avec des enseignes interchangeables où aucun acteur ne parvient sortir de la banalisation du même discours de la promo à tout va où le prix est toujours barré et les « grandes marques » dévalorisés par un discount sans âme.
Le magasin Lunettes pour tous est un concept intéressant d’ubérisation de l’optique, avec une offre très courte, un merchandising lisible et accessible, un positionnement clair, un vision innovante de la distribution pour un public qui voit dans une paire de lunettes un achat fonctionnel, pas un achat de mode au prix opaque. Pour autant, Lunettes pour tous a deux défaut : l’arrogance de son fondateur dont l’humilité n’est pas la première des vertus, et un problème de qualité de services dénoncée sur les réseaux sociaux où les clients se lâchent.
Devenir une enseigne discount implique une exigence de transparence et d’honnêteté dans un rapport de qualité/prix où l’un ne se fait pas au détriment de l’autre. L’Uber de l’optique viendra-t-il de l’autre côté de l’Atlantique où la liberté d'entreprendre est un mode de pensée ?