Après la pluie le beau temps, adage populaire pas toujours effectif eu égard au dérèglement climatique, mais le printemps sacre le retour du soleil, en principe. Un événement qui n’a échappé aux Galeries Lafayette annonçant ces prochaines semaines l’installation de shop in shop Sunglass Hut dans l’ensemble de la chaîne de grands magasins, BHV compris.
Fondée en 1971 à Miami en Floride, le distributeur Sunglass Hut est devenu un acteur de poids dans la diffusion des lunettes solaires aux Etats-Unis et dans une vingtaine de pays, surtout depuis son rachat par Luxottica Group en 2001 pour $653 millions, dettes comprises. Le géant italien a toiletté l’enseigne (qui vendait aussi des montres et autres babioles) et engage désormais une offensive planétaire sur le segment des lunettes solaires. Avec actuellement plus de 3.000 magasins dans le monde, Sunglass Hut a les moyens de s’imposer comme un multimarques référent incontournable dans ce secteur, d’autant que Luxottica Group aligne une trentaine de marques avec des licences très attractives (Armani, Burberry, Chanel, Dolce & Gabbana, Prada, Miu Miu, Paul Smith, Michael Kros, Versace…) et des marques propres qui sont de véritables vaches à lait : Vogue Eyewear, Oakley, Persol ou encore Ray Ban. Cette dernière étant une cool brand planétaire dont la notoriété lui permet de dominer largement dans le domaine des solaires avec près de 50% de part de marché mondiale.
Acheter une paire de lunettes solaires est un acte plus émotionnel que rationnel, alors qu’il est avant tout un acte rationnel pour des lunettes optiques : conséquence, le poids de la marque est dominant au même titre que pour l’achat d’un sac à main, d’un parfum, d’une montre ou d’un accessoire de mode « futile ». Pour preuve, l’étude européenne Optical Monitor de GfK pour le Silmo et le Mido constate des ventes de lunettes solaires en progression de + 3,6% au premier semestre 2015 sur ce segment. « L’appétence des consommateurs pour les solaires a profité à l’ensemble de la filière », commente Gianni Cossar, Directeur Mondial des marchés de l’Optique chez GfK. « Jusqu’à l’année dernière, le marché se développait principalement autour d’une offre d’entrée de gamme et Premium, avec un milieu de gamme très timide dans ses performances, poursuit-il. Mais sur ce premier semestre 2015, seul le segment Luxe (produits proposés à partir de 280 €) qui représentent environ 8% du marché, génère une croissance valeur à deux chiffres de +11% comparée à la même période en 2014. Dans ce contexte, le marché de l’Optique adopte les mêmes mécanismes que n’importe quel autre marché du secteur de la mode ».
Gare pourtant à la banalisation, le secteur des parfums était la clé d’entrée du luxe pour nombre de consommateurs, à trop de mass-marketisation entre les mains des lessiviers, il s’est banalisé au point d’être un vulgaire produit de consommation. Les lunettes sont désormais le premier accessoire d’accès au monde du haut de gamme créatif et du luxe, les industriels de l’optique devront gérer l’équilibre fragile entre sélectivité et diffusion, ils devront calmer l’enthousiasme expansionniste des distributeurs trop prompts à casser les prix et peu préparés à vendre du haut de gamme ; Sunglass Hut peut être l'écrin à valeur ajoutée émotionnelle pour les marques de luxe.
Images : Sunglass Hut/D.R.