Le MIDO, le salon de l’optique-lunetterie italien, a fermé ses portes lundi, laissant un sentiment de flottement au niveau de l’offre uniforme et banalisée avec une forte impression de déjà vu. Les collections se suivent et se ressemblent et on peine à trouver des aspérités, des traits de différenciation dans un marché qui frise la thrombose stylistique.
Comme le témoin de cette « crise de création », le MIDO a dévoilé une exposition — The Glasses Hype — mettant en perspectives l’énergie créative de l’industrie de l’optique-lunetterie via des publicités d’hier et d’aujourd’hui. Pour clore cette exposition, les organisateurs ont proposé leur vision d’avenir : une vaste pièce tapissée de miroirs du sol au plafond et quadrillée de néons blancs plongeant le visiteur dans un vide sidérant.
Il est vrai que le secteur vit une mutation profonde et cette vision d’avenir (absence de vision !) est le reflet d’une industrie qui rebat ses propres cartes. Evidemment, tous les lunetiers, tous les fabricants, toutes les marques petites et grandes ne restent pas le crayon en l’air et savent porter un regard en biais pour apporter de la nouveauté. A l’instar des grands groupes spécialisés dans les licences de mode et de luxe qui ont compris, au-delà du branding des lunettes, la nécessité de forcer sur la valeur ajoutée créative pour répondre à la désirabilité et à la différenciation des griffes dont chacune doit défendre un territoire de marque identitaire et identifiable. Ce qui n’a pas toujours été le cas et qui ne l’est pas encore pour toutes…
La conjonction créativité distincte, savoir-faire industriel, puissance marketing et respect de la marque est le seul axe qui vaille pour sortir de la banalisation. Avec un point supplémentaire : coller à l’air du temps stylistique. Les lunettes étant un accessoire de mode assumé, elles doivent surfer sur les tendances mais sans s’écarter d’un usage, d’une fonctionnalité : elles se portent sur le nez... Une nécessité vraisemblablement négligée par Kering Eyewear qui a lancé sa première collection intégrée Gucci. Des lunettes attendues et rupturistes par rapport au marché, mais un peu trop (de nombreux opticiens n’ont pas adhéré) : entre des formes banales, des ornements tape-à-l’œil, des logos surdimensionnés et des lignes piochées dans l’esthétique du pire des années 80, cette première collection Gucci gérée en directe par le studio de la marque a raté son entrée.
Un revers qui rappelle que la lunetterie est un métier de spécialiste. Le groupe LVMH qui, à l’instar de Kering entend rapatrier ses licences de lunettes dans son périmètre, a pris le soin de ne pas créer une structure ex nihilo, mais de s’associer avec le groupe italien Marcolin, n°3 du secteur, pour garantir la conjonction créativité distincte, savoir-faire industriel, puissance marketing et respect des marques.