Déjà-vu...

Publié par Le captologue sur 15 Février 2022, 09:09am

Catégories : #Innovation, #Marques, #Produits, #Tendances

« Le futur existe-t-il autant que le passé ? » s’interrogeait le physicien et philosophe des sciences, Etienne Klein dans son livre Matière à contredire (Humensis 2018). Aujourd’hui, j’ajoute : « Pourquoi le futur ressemble souvent à ça ? » Quand je dis « à ça », j’évoque la collab’ entre la marque française de mode Coperni et le lunetier coréen Gentle Monster.

En regardant dans le rétroviseur de l’esthétique, les objets « futuristes » offrent un profil lisse, dépouillé, au design limpide sans accroc ni vice (de forme), presque désincarné et finalement attendu. Avec un élément nouveau et récurent lié à notre époque : l’attrait pour la dystopie, comme si le futur était toujours dangereux, angoissant, sombre. Un futurisme brutal et banal en fait qui n’a pas la saveur des années 60 lunaires et positives. Lorsqu’André Courrèges et sa femme Coqueline, qu’il appelait « sa créativité complémentaire », débarquent en Ovni sur la scène de la haute couture parisienne, ils initient une « Couture Future » et révèlent une cohésion positive entre l’homme et son environnement, entre l’homme et son univers, une mode qui se projette dans un futur gai, blanc et pastel, sans emphase ornementale ni drame à l’horizon.

Sébastien Meyer et Arnaud Vaillant, fondateurs de Coperni, se réclament de cette école, ils ont d’ailleurs travaillé pour Courrèges entre 2015 et 2017, et développent à l’envi un design à l’élégance fluide. Le nom de leur marque — Coperni — fait référence à Nicolas Copernic, l’astronome de la Renaissance qui a initié la théorie de l'héliocentrisme, « selon laquelle la Terre tourne autour du Soleil, supposé au centre de l'Univers, contre l'opinion alors admise, que la Terre était centrale et immobile. » Un parrainage de haut vol pour une marque dont l’ambition est d’opérer une révolution copernicienne de la mode qui n’est qu’une affaire de rotations créatives saison après saison. Ce qu’ils réussissent plutôt bien au fil de leurs collections féminines plutôt bien cadencées.

Alors quand je découvre cette collab’ de lunettes, je ne suis ni dans l’extase ni dans un futur enthousiasmant. Gentle Monster, à la surface médiatique et commerciale indéniable (en Asie surtout), très expert en acrobaties marketing, il séduit par une habileté opportuniste à multiplier des collections de lunettes assez peu inspirées en termes de design mais qui font leur effet instagrammable, le Graal de notre vie numérique. Avant de signer cette collab’ « déjà-vu » Coperni aurait dû se rappeler un précepte de leur mentor de la Renaissance : « Il ne suffit pas de tourner autour du vide pour donner du mouvement. ».

Photos : © Alexandre Silberstein/Gentle Monster x Coperni

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